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Je vais acheter des cannoli à  la pâtisserie Sicilienne-Suisse

Je vais acheter des cannoli à la pâtisserie Sicilienne-Suisse

En June 2007
C'était l’été
Ref 173.37

Dans le restaurant où je suis bien décidé à manger mon repas tout seul, sans plus attendre qui que ce soit, un homme entre. Grand, un peu blond, très américain. Méritant. Etait dans l'armée, ou y est encore. Habitué au pouvoir et à chiquer des cigars importants. Il parle aux serveurs, car tout cela ne va pas du tout, les tables, l’organisation, le restaurant, et ça va devoir changer. D'ailleurs, on ne peut pas manger dans cette salle. Surtout pas avec les femmes (très blondes, très méritantes) qui l'accomgagnent, comme on accompagne un plat de résistance. Un peu gêné, le placeur réfléchit à ce qu'il va pouvoir faire. Moi que le pouvoir n'interesse que sous forme de secret, et qui voudrait manger en paix, je lui fais un signe bien entendu, qui recommande la salle du dessus, où de toute façon il n'y a jamais personne. Le placeur, dont le métier est de créer des clients, me fait comprendre ma bonne idée.Une dernière chose avant de monter. Les violonistes de notre étage vont s'entendre là haut, et il s’agirait de ne pas être dérangé, regardez le plafond, il est si fin. La salle entière s'impatiente du départ de l'américain, je le vois glisser un pour-boire énorme au groupe de musique pour qu'il s'arrête de jouer et je me dis que dans ce geste (payer contre la musique), il y a quelque chose d’héroique et de naïf.Rome, 29 Août 2007

Une nuit, chez Roberto, à  parler du poids des livres

Une nuit, chez Roberto, à parler du poids des livres

En June 2007
C'était l’été
Ref 173.19

Parce qu’il est de plus en plus difficile de trouver un bon tireur noir et blanc pour la photographie, j’ai dû me tourner vers un vieil homme grisonnant, assez doué et radotant. Seulement voilà, il se déplace partout à Paris sur un haut tracteur flottant, empruntant les canaux de la Seine, tournoyant pour éviter les autres tracteurs lorsque l’inertie les rapproche dangereusement, et ses longues planches contact, qu’il me livre souvent enroulées en tubes, lorsqu’il me les ouvre sur le tracteur, prennent l’encre et finissent entièrement remplies de bleu, si je les laisse sur le marche-pied trop longtemps.Rome, le 16 août 2007

La Route du Sanglier

La Route du Sanglier

À Ostia
En May 2007
C'était le printemps
Ref 172.10a

A l'ouest de Rome, près de la plage d'Ostia, il y a une pinède qui est la plus grande pinède. On y est rentré en voiture, on a enlevé la capote et on a avancé lentement les phares éteints, sur une petite route ou une trace de route qui s'appelait la route du Sanglier.J'ai vu une étoile filante, très billante comme un morceau de satellite, et quand on s'est arrêtés, dans la forêt on entendait la mer plus que le bruit des arbres.

Narni

Narni

En May 2007
C'était le printemps
Ref 171.22

Sur le quai du métro, assez tard dans la nuit, le métro qui ouvre ses portes les referme presque aussitôt. J’ai le temps de me glisser à l’intérieur, mais les deux filles avec qui j’étais restent bouches bées sur le quai, et je ne sais pas quel signe leur faire alors que ma fenêtre s’éloigne d’elles.Le conducteur prend la parole dans le wagon et indique avec beaucoup de sarcasmes (le conducteur qui avait à peine ouvert ses portes un instant), que ce métro est le dernier de la nuit, et que ce n’est pas la peine pour ceux qui ne l’ont pas pris d’espérer rentrer chez eux indemnes. Je pense à ces deux filles que je voulais attendre au prochain arrêt, mais que, finalement, je ne reverrai plus jamais. D’autant plus qu’elles m’ont laissé la garde d’un large sac de gym, gros comme 4 polochons, que je ne peux même pas mettre sur la poussette, et d’un autre objet étrange.Nous nous regardons vaguement avec les autres passagers, comme on se regarde vaguement dans un métro. Je suis accroché à la barre de métal, au centre, et il y a une autre fille. Je crois que nos bras s’enchevêtrent, ou que j’emmêle dans les lanières de son sac. Pour nous détacher, elle doit faire de grands mouvements de bras, et, pour plus de simplicité, elle décide de poser ma tête sur son gros pull en angora abricot, ce qui n’a pas cessé de me faire rire. Elle le fait avec une grande bienveillance, et j’entends les autres passagers murmurer que j’ai de la chance. Sa station arrive, elle descend en me lançant un au-revoir complice, et je me mets dans un coin avec un sourire immense et les yeux fermés, pour profiter je ma joie. Du coup, lorsque je me souviens que j’ai la garde de la poussette et du sac de gym, il est trop tard et j’ai peut-être déjà raté ma station. Non : c’est juste celle-ci. Un rapide calcul me permet de savoir que j’ai encore le temps de descendre, mais que je dois abandonner les bagages encombrants des filles que je ne reverrai jamais. Donc je sors, plus ou moins satisfait.Seulement les passagers du train se rouent sur le sac, l’ouvrent et, voyant qu’il ne contient que des édredons et des traversins, l’envoient balader par la fenêtre sur mon quai, et la poussette avec.Arrivé sur le quai de cette gare de train de banlieue, je sais qu’il me reste encore du chemin à parcourir à pied, avec cette charge dont je suis responsable et qui me doit tout. Il y a un jeu entre les autres protagonistes, à être sur les rames ou sur le quai, qui m’inspire le sentiment du danger, danger qui grandit lorsque ma charge, bruyante, leur fait tourner les yeux et attire leur convoitise. Et alors qu’ils approchent pour la désosser de nouveau, ne sachant pas si elle mérite que je mette ma vie en péril pour la sauver, il me vient une nouvelle qui me résigne à me battre. Je me souviens de ce que contient le troisième objet : mon béret de marin, celui qui permet d’avoir toutes les femmes, même Nicole Kidman.Rome, le 16 août 2007

Premier matin rue Saint Marc

Premier matin rue Saint Marc

En April 2007
C'était le printemps
Avec Lue
Ref 170.36a

Enfin, je déménage. Ma mère vient d’acheter un triplex avec un nombre suspect de poutres foncées, qui soutiennent des étagères, des mezzanines, des autres poutres et un âtre prolongé par les étages. Heureusement, Anthony et Sylvain sont venus m’aider. Le rez-de chaussée est un salon, ma mère habitera le premier, et le second me ressemblera. Par endroits, l’enchevêtrement de bois est si serré qu’on devine un renfoncement, un couloir bas ou une cachette. Combien d’adolescences ont effacé les trésors protégés par leurs ombres ? L’une de ces cachettes n’est pas si profonde, et je vois quelque chose d’oublié qui y brille. Bien sûr, la vie de ceux qui, comme moi aujourd’hui, ont habité ce labyrinthe m’intéresse. Seulement voilà, il y a un ours. Paris, le 11 avril 2007